Un chemin vaut l'autre
De l'autre côté du miroir
L'Asile
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Spectateurs

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Message Mar 09 Oct 2007 | 12:21  Répondre en citant

D'abord ses mains. Ensuite, une jambe ; puis deux. Enfin, tout le contour. L'anonyme silhouette d'une jeune fille, à la robe blanche, se profilait peu à peu de derrière un rideau. Betty surgissait sur la scène, un sourire à la limite de la grimace fendant ses traits calmes. Son regard inexpressif se posa sur le sol de la scène tandis que ses pieds avançaient jusqu'à son bord. Les bras tendus vers le parquet, la tête reposant sur sa poitrine, elle avait le corps d'un pantin désarticulé. Le vide entre l'estrade et la première marche lui donna soudain le vertige. Premier signe de vie du mannequin, il releva les yeux, contemplant la volée de marches. Soudain, ses pas le menèrent au vide. Il tomba.

La jeune fille se rattrapa. Elle n'était plus sur la scène, mais du côté du spectateur. S'asseyant au premier rang, elle s'offrit un paquet de popcorn qu'une demoiselle imaginaire, à la face masquée, lui vendait. Alors, sous ses yeux émerveillés, le spectacle débuta.

Bom, bom, bom ! Les trois premiers coups avaient sonné. Une petite musique résonna à ses oreilles, dans tout l'amphi, avant de se répercuter contre tout objet saillant. Ce son, qui au début charma Betty, l'effraya de plus en plus. Elle avait l'impression de se faire engloutir toute entière. Et elle ne comprenait pas pourquoi il était là. C'était si étrange… Au point d'en devenir absolument horrible.

— Allez, arrêtez, spa drôle…

Des ballerines, toutes ayant l'apparence exquise de l'internée, surgirent brusquement sur la scène, dansant, chantant, voltigeant d'un côté à l'autre de la scène. Le volume de la sonate augmenta au fur et à mesure de la ferveur des danseuses sur la scène.
Et Betty ne cessait d'hurler pour les arrêter.

— ARRETEZ ! STOOOP, JE VOUS DIS !!

Une fanfare (où tous les musiciens lui ressemblaient étrangement) l'entoura alors,
noyant ses mots sous des sons tonitruants, rendant ses cris inaudibles.
Betty se recrovilla alors sur elle-même en se bouchant les oreilles.

— STOP ! STOP ! STOP ! hurla-t-elle avec le peu de voix qu'il lui restait.

Des larmes surgirent alors de ses prunelles d'un vert éclatant. Quand cesserait-on de la harceler ?!

Ce fut à cet instant là qu'elle apparut… Elle lui rendait souvent visite, en ce moment. Un geste d'elle et tout s'interrompit.

— Merci, chuchota Betty à l'apparition.

— De rien, mon ange, lui répondit t-elle. Ses paroles furent fugitives, passèrent moins d'une seconde dans l'esprit de l'adolescente avant de devenir de plus en plus lointaines, comme un écho ou une voix s'éloignant peu à peu.

Elle était son amie. Elle disait qu'elle était son ange gardien, un ange magnifique, immortel. Elle disait aussi qu'elle pouvait vivre comme elle le voulait, qu'elle ne mourrait jamais. Alors elle avait fait ce qu'Elle avait dit. Elle avait fait ce qu'elle voulait. Depuis, on l'avait emmené là, à l'Asile. Elle disait qu'ici, c'est merveilleux. Elle avait raison. Ici, plus d'école, ici elle pouvait faire ce qu'elle voulait sans qu'on l'ennuie. Elle était enfin seule et libre.

— Tu es mon amie, hein ? lui demanda Betty, les yeux brillants encore de larmes.

— Bien sûr, mon ange.

— Je t'aime, murmura l'internée.

Il n'y eut pas de réponses. Elle disparut. Betty se retrouva à nouveau seule. Pourtant, au fond d'elle, la jeune fille savait qu'au besoin, elle aurait toujours son amie sur qui compter. Enchantée, un sourire joyeux se forma sur ses lèvres charnues et roses.

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Je ne suis jamais seule...
Betty Valhister
Schizophrène


Message Sam 01 Déc 2007 | 22:42  Répondre en citant

Max se réveilla lentement. Il était toujours dur de quitter les doux bras de Morphée. Il ouvrit un oeil, puis l'autre, les ferma tous les deux, se les frotta et enfin, les ouvrit entièrement. Il étendit les bras, les jambes, respira un bon coup, tout cela afin de vérifier que son corps était toujours là. C'est bon, il était là. Mais qu'était-ce ce "là" où il était ? Ca ressemblait à… Non, ça ne ressemblait rien. Il ne se souvenait plus d'où il était ou de ce qu'il pouvait faire là. Il ne se souvenait même pas s'être endormi.
Puis, petit à petit, il se rappela. L'Asile. Evidemment. Comment oublier toutes ces salles où il avait tant vécu, ces couloirs qu'il avait tant traversés et cette salle. L'odéon. Le seul lieu où les fous pouvaient passer pour talentueux, plus talentueux même que d'autres considérés comme sains ailleurs. Sur la scène, toutes les règles changeaient. Restait-il encore des règles d'ailleurs ?

Il avait vu tellement de spectacles sur cette scène, spectacles à la fin toujours tragique : il avait vu… Les frères et les amis s'entretuer pendant que les soeurs et les amantes étaient déchirées par leurs larmes, qui en coulant le long de la peau laissaient des marques éternelles comme de terribles cicatrices… Les fils tuer leur père et partager la couche nuptiale avec leur propre mère et laisser glisser sur son corps dénudé des compliments et des caresses de courtisans avant que la vérité ne vienne tous les aveugler… Les mères enfanter dans les ténèbres et creuser la terre jusqu'avoir les doigts saignants afin d'enterrer profondément leur progéniture honteuse, monstrueuse fille du crime et de la luxure… Les amants s'aimer alors qu'autour d'eux leur sang coulait et leur chair se dévorait et finalement fuir dans l'au-delà et s'y rejoindre pour l'éternité… Les vils ursupateurs assassiner les nobles rois et faire d'un royaume glorieux un cimetière où pourrissent les charognes abattus par la justice filiale, cachée sous le masque de la folie…

Tous les spectacles se terminaient toujours de la même façon, dans un bain amer de sang et de larmes, agressant les narines qui n'en ont pas encore l'habitude, choquant les yeux encore pleins d'innocence et dans lesquels brille la lueur de l'espoir, saignant les oreilles encore habituées à n'entendre que de beaux compliments et de beaux souhaits de félicité, brûlant la peau encore douce et vierge de tout crime.
Il n'y avait peut-être qu'une solution : dormir, rêver peut-être.

Max remarqua soudain la présence, quelques gradins plus bas, d'une fille encore jeune et pas si laide. Elle semblait tourmentée par des ombres qu'il ne pourrait jamais voir, agitée par des voix qu'il ne pourrait jamais entendre. Max eut pitié d'elle et s'approcha lentement, silencieusement. Puis, alors qu'il se trouvait à sa hauteur, il posa sa main sur son épaule dans une intention la plus sécurisante possible.

Je peux peut-être vous aider ?

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J'ai oublié à quoi vivre servait.
Max Traum
Mélancolique


Message Dim 23 Déc 2007 | 16:36  Répondre en citant

Le contact humain sur son épaule fit sursauter la demoiselle. Elle se pensait seule. L'avait-il vu ? Betty tourna la tête vers lui. Son regard était fuyant, elle semblait gênée. Passant une main lasse dans ses cheveux décoiffés, la jeune fille esquissa un sourire presque avenant, un peu fou néanmoins.

— J'ai pas besoin d'aide, merci…

Sa voix était aussi tremblante que celle d'une enfant s'éveillant d'un cauchemar. De chacun de ses gestes émanaient une grande fragilité, contrôlée cependant. Elle ne mentait pas. Tout allait bien pour elle… Détaillant le visage de l'inconnu, elle trouva qu'il était digne de confiance. Peut être qu'un jour, elle irait le voir en cas de problèmes. Une petite voix lui rappela alors qu'elle n'était pas seule. Elle était là. Oui, et elle serait là pour toujours.

Un frisson la parcourut. La jeune interne avait l'impression que son corps était à présent constitué entièrement de glace… Elle avait si froid, si froid… Serrant deux bras blancs et fins autour de sa taille mince, elle tenta de se réchauffer au mieux. Betty chercha la cause de ce refroidissement soudain, et — tout en se détaillant de haut en bas — se rappela qu'elle n'était vêtue que de sa petite robe blanche.

Enfin, l'interne se souvint de la présence de son interlocuteur, en face d'elle. Elle leva à nouveau les yeux vers lui.

— Dis, tu es qui ? Moi c'est Bett…

Alors qu'elle murmurait ces mots, Betty ressentit sa présence tout contre elle. Elle avait posé sa tête sur son épaule et lui chuchotait à l'oreille de ne se fier qu'à elle, et non à cet inconnu. Betty aurait voulu protester, mais de peur de perdre sa seule amie, elle détourna le regard de Max et se frotta le visage à la recherche d'une pensée cohérente. Elle continuait à lui susurrer d'une voix douce de ne pas parler avec les inconnus.

Elle m'a dit que ce n'est pas bien… Maman disait ça aussi… murmura Betty, angoissée.

Le va-et-vient de ses œillades du sol au visage de Max commençait à lui donner le tournis et la nausée. Mais elle ne pouvait choisir entre elle et un véritable rapport humain. Ses deux réalités se confrontaient un combat acharnés. Des larmes de tristesse, d'incompréhension et de fatigue coulèrent sur les joues de la pauvre tourmentée. Elle tentait de la rassurer, lui rappelant qu'elles s'aimaient plus que tout et que rien d'autre ne comptait. L'amour vaincra lui affirmait-elle. Et Max qui la regardait…

— Je suis désolée…

Il ne faut pas parler aux inconnus, s'offusqua la présence.

Betty ne l'écouta pas. Max n'était plus un inconnu, elle connaissait son prénom. Et puis, il avait l'air gentil et sympathique. Ce qui énervait Betty au plus au point, c'était que de toute évidence, elle était jalouse.

Il n'y a que moi qui compte.

Betty lui lança un regard assassin. L'amitié peut être partagé ! Jalouse, jalouse, jalouse…

Jalouse, moi ?!

Betty serait l'amie de Max, bien fait pour sa pomme !

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Je ne suis jamais seule...
Betty Valhister
Schizophrène


Message Sam 05 Jan 2008 | 18:32  Répondre en citant

Alors elle s'appelait Betty ? C'était un joli prénom, et ça lui allait vraiment bien. Cette fille… Elle était si jolie. Si jolie… Elle lui rappelait Sarah. Sarah… Cela remontait à si longtemps… Aujourd'hui tout était terminé. Il ne la verrait jamais plus. Il ne l'entendrait jamais plus. Elle était partie et il ne pourrait jamais la revoir. Parfois Max enviait son sort. Il aurait aimé partir comme elle, partir loin, fuir loin de ce vacarme incessant. Partir… Fuir… Courir, courir loin, si loin, plus loin… Mais il ne pouvait. Il était trop lâche pour faire comme elle. Sarah était forte, lui non. Il avait trop peur. Il ne savait pas exactement de quoi il avait peur, il savait juste qu'il avait peur. Trop peur pour partir. Il ne pourrait jamais. Il ne pourrait jamais la revoir. Sarah… Deux petites larmes se mirent à couler le long de la joue de Max.

Soudain Betty se mit à parler, sortant Max de ses idées. Elle parlait mais ce n'était manifestement pas à lui. Mais alors qui ? Ils étaient seuls. Si elle ne parlait pas à Max, à qui parlait-elle ? Il balaya la pièce mais il ne trouva personne d'autre. Puis elle se mit à pleurer. Pourquoi ? Avait-il fait quelque chose de mal ? Soudain, Max comprit : Betty était déchirée par un conflit intérieur. L'Autre est souvent cause de souffrance mais il y a toujours un moyen de l'éviter. Normalement. Quand l'Autre est à l'intérieur de soi, toujours là, nous accompagnant encore plus fidèlement qu'une ombre alors la torture est incessante, infinie. Le combat perpétuel. On ne pouvait jamais fuir, jamais avoir de répit. A part… Le repos éternel ? Le repos éternel n'était-il pas la solution à tous les problèmes ? La Solution ? La fin de tous les maux ? La fin… Le regard de Max retomba sur Betty. Elle lui souriait, quelques larmes brillant encore dans ses yeux. Il eut pitié d'elle, pitié de son mal qui ne connaîtrait peut-être jamais de fin, et la prit dans ses bras.

Ne vous inquiètez pas. Bientôt tout cela sera terminé. Tous vos problèmes disparaîtront. Je vous le promets.

Betty le regardait d'un air interrogateur, comme si elle ne comprennait pas exactement ce qu'il voulait dire. Tant pis. Elle le découvrirait bien assez tôt. En attendant… Elle semblait encore pertubée par une présence que Max ne pouvait percevoir. Il passa un main tendre le long de la joue de la jeune fille.

Ne vous inquiètez pas.

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J'ai oublié à quoi vivre servait.
Max Traum
Mélancolique


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