Ah, les hommes, les hommes, les hommes.
Je me sens mal, mais ça va bien. Je suis fort, je suis puissant, je n'ai besoin de personne, je suis un mâle. Hahaha ! Les hommes. Va-t'en, mais ne pars pas. Laisse-moi, mais laisse-moi ta main. Je m'en vais, retiens-moi. Incohérents, sans aucune ligne directrice, sans aucune bravoure, sans aucun panache enfin ! Jamais ils ne s'abaisseraient à livrer le fond de leur pensée, l'exprimer, ou, au moins, agir en adéquation avec.
Car au final, c'était à elle qu'on laissait le soin de tout faire. De tout entendre, de tout deviner, mais surtout de jouer la cruche, de faire semblant de ne rien voir, mais de les satisfaire tout de même, car elle voyait tout, évidemment ! C'est si limpide, un homme !
Mais si charmant, aussi.
Malgré le peu de franchise qu'on peut imaginer au sourire qu'arbora Manara à cet instant, elle se vit pourtant rechigner à abandonner la silhouette spectrale et engoncée. Sa main restait obstinément au creux de celle de Valérian.
Mais qu'est-ce qu'elle lui trouvait ?
Il fallait qu'elle reprenne le contrôle de la situation, le contrôle d'elle-même. Elle pencha doucement la tête — tel est prise qui croyait prendre, lui glissa-t'on au passage. Ah, ça suffit, hein ! s'offusqua-t'elle, sans remarquer qu'elle avait parlé à voix haute. Elle ne voulait pas rester seule, elle avait besoin d'un peu de compagnie, voilà.
Les joues légèrement empourprées, elle se surprit pourtant une nouvelle fois en proposant à son Charon avec candeur : Où allez-vous ? C'est à mon tour d'être votre guide.
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Ecoute l'air qui se fredonne, qui va et vient, qui tourbillonne, et se disperse aux quatre vents... Stéphane Mellino