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L'Asile
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Evacuation de sombres pensées

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Message Dim 07 Déc 2008 | 23:11  Répondre en citant

Pauvre petit Bibliothécaire, pourquoi cette déception de ne pas être de sa venue la raison ? Ta merde a-t-elle donc tant d'importance qu'un autre doive en venir percevoir les dignes plongeons ?

Ah non pardon, c'est ton savoir qui est remis en question.

Car en effet le quinquagénaire ahuri ne comprenait pas l'inquiétude de son collègue. Quel mal y avait-il à ce que les internés se distraient un peu, même violemment. Après tout, ils étaient fous, c'était dans leur nature non ? Sans compter que l'histoire de l'Asile s'étoffait dans le même temps. Il ne voyait pas le moindre danger pour sa position là-dedans, et donc cette préoccupation l'intriguait, le laissait avec la vague impression d'avoir manqué un événement ; et il n'y avait pas de meilleur moyen pour susciter son énervement, si toutefois celui-ci n'avait pas fait une légère apparition déjà auquel cas il s'en trouvait aggravé.

Oh vous commencez à m'emmerder ! Laissez les donc se divertir un peu, nous n'y perdrons rien. Les observer de loin dans des situations libres vous facilitera peut-être la tâche en plus qui sait.
Le Bibliothécaire



Message Sam 10 Jan 2009 | 17:50  Répondre en citant

Le Psychiatre, surpris par la réaction de son collègue, l'était moins par le fond qui l'animait : celui-ci avait toujours considéré l'Asile comme un livre ouvert dont il attendait que les internés lui tournent les pages. Malgré tout, le Psychiatre restait profondément choqué par une telle position. L'Asile n'était pas un gigantesque parc d'attractions ! Les internés, avant d'être des sujets d'étude, étaient des êtres humains, et dans un soupir las il se demanda silencieusement s'il n'était pas le dernier à encore le croire parmi les Instances.

Que penser de la réponse de son collègue ? On lui parlait d'amusement, d'observation, on aurait bien pu lui parler de tout comme de rien, et faire référence à la récente conquête des chambres comme à autre chose. En somme, soit le Bibliothécaire était déjà au courant des événements et s'agaçait de voir qu'il n'était pas le seul, soit il s'agaçait justement de réaliser qu'on en savait plus que lui à ce sujet — et son bluff n'avait pour but que de donner le change.

Alors, quoi ?

— Vraiment, nous n'avons rien à y perdre ? Mesurez-vous les conséquences d'un tel coup de théâtre ? Je vous aurais cru moins indifférent, c'est du jamais-vu, après tout. Etes-vous allé constater de vos propres yeux l'étendue du bouleversement ? En imaginez-vous seulement la portée ?

Voilà de quoi, peut-être, délier la langue de ce vermisseau, et à défaut, si celui-ci prétendait effectivement détenir un savoir qui lui échappait encore, de quoi lui donner quelques frissons.

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Seul qui se perd entier est donné à lui-même
Stefan Zweig
Le Psychiatre



Message Dim 11 Jan 2009 | 13:13  Répondre en citant

Rétention ou excrétion ? Ses pensées au sujet des maigres tentatives inabouties des quelques internés qui vivaient encore ici valaient-elles d'être jetées en ces lieux comme il tentait il y a quelques minutes d'en faire disparaitre d'autres ? Une petite boulette juste pour bien signifier qu'aux dernières nouvelles il avait encore toute la maitrise du journal de cet établissement.

Bah, que je sache il n'y a encore pas eu grand mal.

Quelques mots durant lesquels il ose réduire un peu cette distance entre eux, n'y laissant que l'espace d'un lavabo. Et en effet, il ne se sent pas inquiet, pas le moins du monde. Quelque part, c'est justement ce qui l'embête, le devrait-il ? N'avait-il pas certaines des informations qui justifieraient cet affolement naissant ?

Ils s'acharnent ces fous, mais aucun n'est encore parvenu à percer ces mystères. J'en viendrais presque à m'amuser de leurs pitoyables tentatives tout en espérant quelque part qu'ils réduisent au silence le ricanement de cette sale bestiole.

Sa main se dépose négligemment sur la surface crasseuse du bac en faïence et son corps s'incline pour y prendre appui. Quel contact affreux ! Mais il l'y laisse — le mal est fait — et tente de prendre un air mutin qui relèverait plus du sourire malsain d'un psychopathe en exercice, dans un croisement de jambes raide. Crispé, bien entendu, presque halluciné, les paupières écartées, les lèvres se desserrant sur une largeur maximale, découvrant légèrement une rangée de dents jaunâtres mal ordonnées.

Ce qui me surprend en fait c'est de vous voir si concerné. Rien n'est encore écrit voyons ! Auriez-vous peur de perdre le contrôle ?
Le Bibliothécaire



Message Dim 11 Jan 2009 | 13:59  Répondre en citant

Il ne savait pas. Passe pour la première chambre, l'événement s'était produit de lui-même, quasi naturellement, sans annonce ni fioritures. Et, le Bibliothécaire n'avait pas tort, rien n'avait changé. Excepté que le phénomène s'était reproduit. Et dans un intervalle de temps relativement bref. Comment pouvaient-ils se permettre de l'ignorer ?

— C'est l'hôpital qui se moque de la charité, répliqua-t-il dans un sourire.

Afin de ménager son effet, il suivit la cadence de son collègue et s'approcha à son tour jusqu'à clore l'intervalle qui les séparait encore, la tête penchée sur lui comme sur un enfant :

— Vous pensez qu'aucun n'est parvenu à percer les mystères de l'Asile ? Ils l'ont fait. Une chambre est déjà passée entre leurs mains. La deuxième subit leurs assauts à l'heure où je vous parle. Que dites-vous de ça ? S'agit-il de pitoyables tentatives ? Si nous ne réagissons pas, c'est l'Asile entier qui sera tôt ou tard sous leur contrôle.

Le Psychiatre avait-il donc tort de s'inquiéter autant ? Avait-il réellement peur de perdre le contrôle, sa place, paniquait-il devant une simple éraflure à un statu quo séculaire ? Peut-être. Peut-être s'angoissait-il à propos du sort de son propre postérieur. Malgré tout, les faits étaient là, leurs conséquences, palpables, leurs implications, inimaginables.

— Les choses ont une raison d'être telles qu'elles sont. Je ne me serais pas cru plus réactionnaire que vous, ricana-t-il, mais les internés sont ici parce que l'autonomie leur fait défaut. Une inversion des rôles, aussi divertissante soit-elle, ne me paraît pas la thérapie idéale.

Oserait-on lui rétorquer qu'il devrait au moins essayer pour le savoir ?

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Seul qui se perd entier est donné à lui-même
Stefan Zweig
Le Psychiatre



Message Lun 12 Jan 2009 | 11:57  Répondre en citant

Une chambre est déjà passée entre leurs mains.

Quelle sensation étrange, il semblait que l'air ne parvînt plus convenablement à ses poumons. Cela venait sûrement de la proximité soudain beaucoup plus importante et largement moins contrôlée du Psychiatre. On ne pouvait réellement parler de contrôle pour la sienne propre quelques secondes auparavant car il savait en général comment il devrait réagir d'après les connaissances qui lui traversent le crâne, mais de là à dire qu'il avait vraiment suffisamment expérimenté physiquement ces différentes réactions…

Une chambre est déjà passée entre leurs mains.

Non, il ne rétorqua pas la moindre chose. L'idée lui traversa certainement l'esprit par réflexe, dans le flot d'autres problématiques qui l'accompagnaient, toutefois les probabilités qu'elle parvienne à actionner le levier de la parole étaient bien faibles. Pour l'instant, l'impulsion dominante pourrait se résumer à peu près de la manière suivante :

m…m…mais… NON !

Finie l'impertinence, tandis que le lavabo crasseux qu'il conservait sous la main pour appuyer son attitude devenait un support des plus agréables au point qu'il choisît de faire quelques pas tremblants en arrière, en tâtonnant, afin de vérifier s'il en était de même pour celui juste derrière lui.

Bon, soyons clairs, ce n'était pas vraiment la prise de pouvoir des internés qui suscitait cette réaction quelque peu disproportionnée. Après tout, de ce côté là, il suffisait de faire preuve de suffisamment d'autorité pour la leur reprendre, nul doute que le Directeur puisse en être capable, ou peut-être que l'empêcheur de tourner en rond qui lui faisait face pourrait les convaincre de quitter les lieux en douceur en étant convaincus d'avoir mal agi et peut-être même les soumettre au traitement qui leur permettrait de ne plus y penser. La problématique n'était pas là, évidemment. Plutôt que…

Une chambre est déjà passée entre leurs mains. ET IL NE LE SAVAIT PAS !

Sur les mots du Psychiatre il sut qu'il s'agissait là de la vérité. Comment expliquer que la bibliothèque ne contînt pas cette information, qu'il ne pût y accéder, qu'il n'en eût pas tout de suite été informé, qu'en tentant de trouver la source de cette lacune en cet instant il ait eu l'impression d'une zone d'ombre, d'une brèche dans le système parfaitement rationnel, cohérent qu'il était parvenu à établir. On aurait dit… oui… comme une volonté indépendante de la sienne qui créerait ses propres rayonnages dans un système de classement que lui-même ne pouvait décrypter. Une intervention externe ou bien l'Asile chercherait-il à lui masquer cette information de son plein gré…

Non, non, ils ne pouvaient pas étendre leur pouvoir jusque là n'est ce pas ? Ils n'en avaient pas la force ! Mais alors…

Co… comment l'avez vous appris ?
Le Bibliothécaire



Message Lun 26 Jan 2009 | 0:55  Répondre en citant

Jeu, set et match. Le Psychiatre, il ne s'en cacha pas, buvait du petit lait. Il était si rare de battre le Bibliothécaire sur son propre terrain, si plaisant de voir la panique froncer ses bajoues et convulser ses paupières crapuleuses. Le Psychiatre, sur lequel le spectacle de la déroute de son collège agissait comme un narcotique, s'autorisa un moment de gloriole puérile. Daubeur, il effaça l'espace qui s'était à nouveau créé entre eux et se pencha de nouveau sur son collègue rabougri, un sourire mesquin au coin des lèvres.

Le Psychiatre n'exultait pas seulement d'avoir rabattu le caquet de ce cancrelat poussiéreux, de lui avoir coupé le souffle même ; il y voyait surtout une victoire sur lui-même, sur la partie de lui qu'il craignait avoir en commun avec ce petit homme suranné, courant après le temps en se repaissant des miettes et des déjections que les autres laissaient derrière eux, les inventoriant, les compilant, les classant sans fin et presque sans but, aveuglé par un idéal d'omniscience, de possession, de contrôle.

Le Psychiatre élargit encore un peu son sourire, une lueur mauvaise au coin des yeux. Puisqu'il avait l'avantage, il comptait bien le conserver et s'octroyer une petite récréation. Le Bibliothécaire ne se laissait pas facilement désarçonner, retrouverait-il facilement ses moyens ?

— La question qui se poserait plutôt est : "Comment se fait-il que vous ne l'ayez pas su ?" Et si notre rencontre fortuite n'avait pas eu lieu ? Vous feriez un bien piètre gardien…

Condamner la conduite de son collègue était une chose, se réjouir de son désarroi une autre : surveiller en lui-même des comportements semblables et s'en parer ne nécessitait pas de se gargariser autant d'une victoire somme toute factice, transférentielle. L'exultation qu'il ressentait était en réalité à la hauteur de la crainte qu'il nourrissait. Mais l'auto-analyse serait pour plus tard, il s'agissait de boire cet instant jusqu'à la lie, de ne pas perdre une goutte du nectar délicieux de la vanité.

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Seul qui se perd entier est donné à lui-même
Stefan Zweig
Le Psychiatre



Message Lun 26 Jan 2009 | 21:59  Répondre en citant

Un piètre gardien !

Trop de proximité, il lui fallait de l'air, de l'espace et il n'y avait pas beaucoup de moyens de l'obtenir sans perdre encore plus la face. Convulsion soudaine de son bras droit qui se déplia pour agripper le col du semeur de troubles mentaux et réduire encore l'espace. Au plus près. Assurant sa prise de l'autre main, il se laissa aller à une autre exclamation balancée en pleine face.

Vous ne comprenez pas !

Alors seulement il le repoussa violemment, puis s'arrêta, hébété par son geste, haletant devant l'effort fourni. Eh oui, on ne pouvait pas dire qu'il s'agissait là d'une activité familière, il abhorrait les contacts physiques, préférant agir sournoisement en se fiant à ses connaissances pour obtenir satisfaction ou vengeance. Savait-on jamais, il aurait pu se retrouver avec de la merde collée aux doigts. Ç'eût été regrettable.

L'oxygène revenait à son cerveau que la tension avait laissé bien isolé. Une fraction de seconde supplémentaire fut nécessaire pour chasser un maximum de ces déchets intellectuels alimentés par sa colère, sa peur. Il ne retrouverait pas le contrôle, pas tout de suite, mais pouvait poursuivre d'une voix légèrement tremblante.

Ne voyez-vous pas que si cet événement m'est inconnu, ils ont pu mettre la main sur bien plus que cette simple salle. Imaginez qu'ils aient pu s'emparer de certaines connaissances avant même qu'elles aient atteint notre bibliothèque, ce qui d'après moi serait la seule explication à ce que je n'en aie pas eu vent. Comment s'y sont-ils pris ? Qu'ont-ils pu dissimuler d'autre ?
Le Bibliothécaire



Message Mar 27 Jan 2009 | 4:49  Répondre en citant

Un glapissement, une empoignade, un second glapissement, une bourrade. Tout était allé très vite, trop vite pour le Psychiatre qui, bien que rodé aux altercations avec les patients (ne venait-il d'ailleurs pas d'en laisser une derrière lui ?), s'était laissé surprendre par la fureur du petit homme qui lui faisait face, étreignant sa veste avec raideur, comme un enfant son objet transitionnel. Passé l'étonnement, il n'eut que le temps de s'agripper à un lavabo pour conserver son équilibre — si le Bibliothécaire avait été de plus solide constitution, le Psychiatre se serait certainement étalé par terre.

Il retrouva ses esprits en même temps que son aplomb et ne tarda pas à sentir poindre la terreur chez son collègue : on craignait de voir son pouvoir réduit, amenuisé, ridicule peut-être ? Comment savoir ? N'ayant même pas été conscient de la perte d'information, le Bibliothécaire était dans l'incapacité de mesurer l'étendue de son ignorance : n'avait-il raté que quelques événements récents ou vivait-il dans une illusion d'Asile, n'en saisissant qu'une infime fraction ? Le Psychiatre avait ouvert une trappe dans l'esprit du Bibliothécaire par laquelle la terreur s'était engouffrée, trou noir absorbant à une vitesse folle toutes ses idées et conceptions.

Réajustant son encolure, le Psychiatre, comme ces personnages cruels écrasant les mains de celui qui s'accroche au bord du précipice, tenta de pousser un peu plus le Bibliothécaire vers dans sa spirale de panique. On voulait prendre les internés de haut, se sentir tout puissant à l'aide d'agglomérats de papier et d'encre, de choses figées, inertes, périmées avant même que d'être tirées du néant pour s'organiser en natures mortes, incapables de restituer la complexité et la vitalité de ses objets d'étude. Soit. Le Psychiatre disposait d'autres outils et d'autres armes.

— Peut-être que votre méconnaissance est liée à la nature-même de l'événement. La bibliothèque serait constitutivement incapable de récolter ces informations. Ce n'est peut-être pas du fait des internés, mais de la nature-même de l'organisation de vos ressources. Ou bien… L'Asile est divisé. Peut-être la bibliothèque a-t-elle choisi leur camp. Tout ce qu'elle contient deviendrait alors biaisé, trompeur, destiné à nous mener à des conclusions erronées.

Il aurait pu rassurer le Bibliothécaire, lui dire que lui, Psychiatre, disposait d'une connexion avec les internés et savait, ressentait, quelles parties de l'Asile leur appartenaient ou non ; il aurait pu l'assurer qu'une seule pièce était passée entre leurs mains, lui expliquer qu'a priori les internés ne connaissaient ce regain d'influence qu'au sein des pièces qu'ils avaient soumises, qu'il semblait invraisemblable qu'ils aient pu avoir un quelconque ascendant sur la bibliothèque et son contenu.

Oui, le Psychiatre aurait pu mettre en avant le travail d'équipe, et donner les moyens à l'Instance qui lui faisait face de réagir efficacement face à l'urgence qui les occupait. Mais le Psychiatre n'aurait jamais pu se priver de l'opportunité de prolonger ne serait-ce que d'une seconde supplémentaire du tableau délectable que son collègue donnait à voir.

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Stefan Zweig
Le Psychiatre



Message Dim 01 Fév 2009 | 23:53  Répondre en citant

Voilà qu'on lui suggérait la pire des humiliations, le châtiment qu'il ne pourrait comprendre. Si le Bibliothécaire avait blêmi devant la constatation d'une absence dans ses archives, son visage devait prendre maintenant une teinte cadavérique. A juste titre puisque son existence même était remise en cause. La bibliothèque du côté des internés…

L'Asile courait-il lui-même à sa propre perte ? Cherchait-il a faire disparaitre sa structure pour ne laisser là que les pérégrinations des fous dans un univers chaotique ? Pourrait-il s'y opposer alors, le devait-il ? Quel choix lui restait-il sinon accepter cet état de fait et refaire corps avec ses données.

Arrêtez…

Un gémissement, quelques pas en arrière, encore, et encore, et encore.

Car oui, il faudrait alors renier toute sa philosophie. Il ne pourrait rester adepte de l'ordre et d'un système de classement infaillible dans un monde géré par les dysfonctionnements de l'esprit. Ce ne serait plus vraiment lui en fait, en y réfléchissant bien, seulement un autre bibliothécaire, dérangé lui-même sans doute. Pouvait-il plonger dans la folie ?

Sa propre image lui apparut, le visage défiguré par une expression extatique, un sourire affreux aux lèvres alors qu'il jetait allègrement des volumes rares dans les flammes pour le plaisir de voir crépiter les étincelles de leur combustion, l'ensemble de l'édifice se disloquant autour de lui. Et il chantait, comble de l'horreur. Une exclamation de vive voix. Forte et fière. Diarrhée de paroles sans sens et d'idées sans raison balancée dans la fange bouillonnante des débris de personnalités qui se débattaient sous lui au cœur de la fournaise.

Gueulez tant que vous voudrez
Brulez, brûlez, brûlez
Crépitez dans les flammes, hurlez
Vous vous absoudrez

Ici, pas de guérison
Rions, rions, rions
Esclaffés devant les flammes, prions
Que vous l'ayez bien profond


Et le mur derrière lui l'arrêta alors qu'il fredonnait ces paroles inconsciemment.
Le Bibliothécaire



Message Mer 18 Mar 2009 | 0:04  Répondre en citant

L'on eût pu imaginer voir bourgeonner quelque contentement au coin des lèvres du Psychiatre, éclore au coin de ses yeux quelques graines de joie, fleurir sur son front haut une ride de victoire ; l'ivresse d'avoir plongé son collègue dans un tel désarroi lui laissa pourtant un arrière-goût amer. N'était-ce pourtant pas là le fruit de son propre travail, ne l'avait-il pas désiré, n'avait-il pas mis en œuvre une stratégie dont il tirait fierté, tissé de fins rets pour laisser avec négligence son adversaire s'y prendre lui-même et savourer le nectar du spectacle de l'y voir se débattre ? La déroute de son compagnon ne faisait pourtant que lui soulever doublement le cœur : de compassion et de mépris.

Mépris pour le Bibliothécaire, sa faiblesse, sa veulerie et le pantomime minable qu'il donnait à voir, tout autant que pour lui-même, l'auteur de tout ceci, et incapable de ne pas s'en enorgueillir. Le Psychiatre se trouvait pourtant impuissant à faire le moindre geste emphatique envers son ami, poser une main sur son épaule, l'attraper par le coude, lui adresser quelques mots bien choisis, pour le sortir de sa stupeur, lui donner les moyens d'affronter la tempête qu'il avait lui-même déclenchée. Il garda sa position rigide, dominatrice, et lui lança avec arrogance :

— Voilà un laisser-aller parfaitement indigne d'une Instance. Nous n'avons pas le temps pour ces enfantillages. Ressaisissez-vous.

N'était-il pas plutôt question de frapper un homme à terre ?

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Stefan Zweig
Le Psychiatre



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