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Chroniques de rêveries {Lucie Manford & Terry Caldwell}

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Message Mer 17 Déc 2008 | 22:00  Répondre en citant

Dans un espace vert de l'Asile, similaire au parc, des bruits de froissement de feuilles et de talons se firent entendre. La personne qui dérangeait le silence régnant était Lucie Manford. Elle marchait dans un sentier de terre sèche qui parcourait cet espace dans sa longueur, dans une tenue que certains auraient trouvée aguichante. Un ensemble mauve constitué d'un haut dont les bretelles lui tombaient sur les coudes, avec un décolleté plus que plongeant, et d'une jupe plissée lui arrivant jusqu'aux genoux. Un boa de la même couleur passait sur sa nuque pour tomber sur sa poitrine. Des grands talons lui faisant des jambes élégantes, mais d'apparence très fragile. On pouvait voir ses frêles épaules, à la limite du squelettique. Ses cheveux longs et lisses lui couvraient le dos. Une femme représentant la fierté, la noblesse et la confiance en soi. Mais ce n'était pas ce qui se passait réellement.

Elle espérait que quelqu'un la remarque. Que quelqu'un l'arrête, et lui dise Bonjour, mademoiselle, comme vous êtes élégante ! Mais il n'y avait personne. Personne pour la rassurer sur la beauté qu'elle estimait n'avoir jamais perdue. Elle n'avait jamais oublié sa vie de mannequin. Cette vie où tout le monde la remarquait, où on la regardait dans la rue. Cette vie où les garçons se bousculaient pour pouvoir l'approcher. Cette vie était très précieuse à ses yeux, et sans elle pour la guider, ses pas la menaient vers un futur incertain. C'étaient ces souvenirs qui la poussaient à essayer à la retrouver, quoi qu'il arrive. Sinon, quel serait l'intérêt de la vie si l'on n'essayait pas de rendre chaque jour meilleur ?

Elle retourna devant sa chambre. Elle ouvrit la porte, puis s'allongea sur son lit après avoir déposé son boa sur un crochet mural, et enlevé ses talons. Elle ferma les yeux, et s'assoupit avec une triste et nostalgique dernière pensée.
Lucie Manford
Mélancolique


Message Lun 22 Déc 2008 | 16:57  Répondre en citant

Les rayons du soleil levant perçaient les fins rideaux beiges, une lueur tamisée baignait la chambre.
De la masse informe recouverte d'un linceul blanc qui gisait sur le lit ne sortait qu'une boule de cheveux noirs emmêlés et éparpillés sur l'oreiller, seul — de temps à autre — un semblant de respiration semblait briser l'inanition du moment.

Après de longues minutes, fuyant la lumière trop agressive même pour ses paupières closes, Terry finit par sortir son visage de sous ses draps. Un long bâillement étira sa face, suivi d'un second, plus plaintif, rappelant inexorablement le manque de sommeil.
La journée semblait belle, des petits piaillements d'oiseaux traversaient l'épaisseur du double-vitrage, les rayons étaient forts et chauds et un bourdonnement lointain laissait penser que nombre de pensionnaires étaient dehors pour prendre l'air malgré l'heure matinale.

Terry s'enfuit de nouveau au creux de son lit, les yeux fermés, le drap remonté jusqu'au dessus de sa tête, elle aurait voulu se rendormir encore un peu, non pas qu'elle fût encore vraiment fatiguée mais histoire que cette journée se passe le plus rapidement possible, histoire qu'à peine les yeux ouverts il soit déjà l'heure de retourner se coucher. Mais il n'en était rien, cet enfoiré de soleil l'avait tirée de ses rêves dès ses premières lueurs. Elle détestait les jours trop heureux, les jours de gaieté nationale, les jours où tout le monde a envie de dire bonjour à son prochain, les jours où le glacier par pure bonne humeur vous fait don de la glace que vous venez de commander, les jours où tous les couples, tous les parents et tous leur marmots ont décidés de sortir profiter et exhiber leur bonheur écœurant.

Non, vraiment, elle haïssait ces jours grotesques. Malheureusement pour elle, cette nuit — bien que courte — avait été assez réparatrice pour qu'elle ne puisse se rendormir.
D'un bond elle se leva et presque d'un seul autre bond s'enferma dans la salle de bain. Elle appuya sur le bouton qui enclenche le jet d'eau, elle se mit à couler, chauffant doucement au fur et à mesure. Elle ôta sa robe de chambre de patiente, regarda son visage décharné dans le miroir, passa un doigt sur ses cernes, attacha ses longs cheveux noirs à l'aide d'un élastique et pénétra dans la douche. L'eau était bien chaude et faisait rougir sa peau de plaisir. Elle resta sous le jet une bonne vingtaine de minutes, les yeux fermés, juste en savourant le plaisir de la chaleur.
Quand, à force d'eau sur son corps, elle commença à ressentir les effets des gerçures sur ses mains, elle se décida à sortir, sans même s'être savonnée. Elle termina sa toilette rapidement et machinalement, enfilant les gestes les uns après les autres avec lassitude.

Elle passa par pure obligation des sous vêtements dépareillés, un string brun dont le soutien-gorge a perdu une bretelle depuis longtemps et qui a terminé à la poubelle, un dessus bleu dont le string n'a pas survécu au dernier lavage caché entre deux essuies à faire bouillir, des chaussettes vertes reçues pour Noël deux années plus tôt à un magasine d'achat par correspondance.
Elle sortit de la salle de bain et profita du bol d'air frais qui enveloppa son corps, il faisait vraiment trop chaud là dedans. Elle ouvrit sa garde robe, deux jeans, trois pull, deux gilets, cinq t-shirt , un chemisier et une robe — deuxième partie d'un ensemble interchangeable "robe-bolero-short-polo" dans un même motif kaki commandé au même magasine par correspondance que celui des chaussettes vertes. C'est cette robe qu'elle choisit, vu la température au dehors, un jean semblait bien trop chaud, surtout qu'elle ne comptait pas mettre un pied dans le jardin, mais plutôt passer l'après midi devant sa fenêtre à peindre, sous la chaleur écrasante de la vitre.

Une fois ces commodités effectuées, elle s'installa devant son chevalet, attrapa sa palette de peinture, son plus beau pinceau et réfléchit. L'inspiration ne semblait pas venir, elle ne venait jamais de toute façon, Terry n'était pas une artiste complète, elle savait écrire des choses croustillantes dont raffole un public peu érudit et en quête de sensations fortes, certes, mais elle était incapable de peindre quelque chose qui soit un tant soit peu esthétique. Comme à chaque fois, à force d'attente, elle finit par tracer des lignes à tout hasard, à tremper son doigt dans la noisette de peinture puis à l'écraser partout contre la toile, à écraser son pinceau puis à le faire rouler entre ses doigts jusqu'à ce que ces poils forment une aura autour du long bâton, à jeter la peinture avec ses mains , plantée à un mètre du chevalet, en la lançant de toutes ses forces. Puis quand la toile devenait trop chargée, horriblement colorée, que les motifs s'empilaient dans un méli-mélo défiant toute notion d'esthétisme elle s'arrêtait, s'asseyait à l'autre bout de la pièce sur une chaise contre la porte et regardait son travail durant des heures, en cherchant une signification cachée peut-être derrière ses gestes. Elle aurait aimé être comme ces patients des feuilletons télévisés, qui gribouillent quelque chose au coin de leur feuille pendant que le médecin leur parle et qui traduisent par là leur pathologie et qui se font soigner, puis ressortent à la fin de l'épisode et retrouvent leur ancienne vie. Oui, Terry aurait aimé qu'il en soit de même pour elle, elle pensait être guérie mais puisqu'une sortie n'était pas prévue pour tout de suite (lui avait répondu le médecin lorsqu'elle avait posé la question), c'est qu'elle ne devait pas l'être, mais vraiment elle ne comprenait pas ce qui n'allait toujours pas.

Car après tout, Terry aimait bien sa vie d'avant : la célébrité, les séances dédicace, les interviews pour les magazines féminins, les petits cadeaux de son agent afin de chouchouter sa meilleure recette de l'année et de préparer le terrain pour sa meilleure recette de l'année suivante, les restaus chics avec de riches hommes férus de lecture policière à suspense…
Oui, à vrai dire, maintenant qu'elle était ici, Terry aimait sa vie d'avant.

Au bout du couloir, le bruit du chariot à nourriture cliquetait. Elle remit la chaise sous la table, couvrit la toile d'un essuie de toilette pour qu'on ne puisse pas la voir — car après tout, ce n'était pas une simple infirmière de centre de jour qui serait capable de juger ce qu'elle estimait pouvoir devenir un chef d'œuvre un jour.

Elle jeta un œil au dehors, le soleil brillait toujours autant, les oiseaux piaillaient toujours aussi fort et les autres pensionnaires avec toujours l'air aussi cons dans leurs pyjamas assis sur les bancs du jardins un sourire béat sur les lèvres, elle regrettait déjà les torrents de pluie de ces quatre derniers jours.

Il était 18h et Terry n'avait pas très faim mais il fallait faire semblant d'aller mieux que cette bande d'abrutis pour espérer une sortie rapide, elle remercierait avec un grand sourire l'infirmière en chef venue lui apporter son plateau, elle lui parlerait de choses absolument stupides comme l'excellent temps qu'il fait où la bonne odeur du mets apporté , puis elle jetterait le tout dans les toilettes, tirerait la chasse et attendrait patiemment le retour du chariot pour redire des choses tout aussi inintéressantes.

Le chariot s'éternisait, Terry commençait déjà à s'ennuyer. Elle se retourna et constata que le lit d'à côté était vide. Comme toujours. Et Terry se fit la même réflexion qu'à l'habitude, « qui pouvait bien être son compagnon de chambre pour ne jamais y venir ? », il y avait bien des vêtements dans la garde robe à côté de la sienne, une brosse à dents dans le gobelet de la salle de bain, un essuie mouillé sur la barre métallique à côté de la douche mais personne ne venait jamais, ni pour dormir, ni pour manger, ni pour se laver … Terry le savait bien, elle ne sortait pratiquement jamais de sa chambre et ses nuits étaient si agitées qu'elle ne s'endormait que sur le matin. Et jamais elle n'avait croisé cet individu qui semblait être une femme au vu des vêtements dans la garde-robe, bien que vu le lieu ça ne veuille rien dire.

Alors qu'elle imaginait — pour passer le temps — mille hypothèses pour s'expliquer cette absence, un vertige lui fit tourner la tête, son regard se brouilla jusqu'à l'aveugler complètement, un mal inconnu martelait sa tempe, dans la chaleur enivrante de cette fin d'après-midi, elle s'évanouit.
Terry Caldwell
Paranoïaque


Message Sam 03 Jan 2009 | 16:48  Répondre en citant

Cette matinée était belle. Fraîche, mais belle. La rosée avait recouvert toute la nature. Le soleil brillait, donnant un semblant de chaleur aux territoires que l'ombre n'avait pas encore conquéris. C'est ce qu'aurait bien voulu Lucie. Cependant ici, ce n'était pas à sa guise. Elle n'allait même pas voir quel temps il faisait dehors, elle le savait. Elle marchait dans les grands couloirs blancs, et croisait certaines personnes. Si on lui disait le bonjour, elle le retournait. Si c'était une femme, elle l'ignorait. Si c'était un homme, elle lui souriait. Un s'arrêta pour lui dire qu'elle était ravissante, mais ce fut probablement une illusion de son esprit. Un rêve, tout en étant éveillé et en pleine connaissance de soi. Une de ces choses que l'on dit que ça n'arrive jamais, que c'est une légende, en sachant pertinemment que ça nous est tous arrivé un jour.

La demoiselle alla manger à la restauration. Elle s'assit à une table où était assise une dame, d'un âge avancé, qui lui fit la conversation. Elle lui parlait de sa famille, de son fils qui avait fait de longues études, qui avait une femme magnifique, qui avait toujours tout réussi dans sa vie. Elle lui parlait de son ancien mari, un homme fier et généreux. Elle lui parlait de tout ce qui lui tenait à coeur, et Lucie lui souriait. Elle aimait ce genre de compagnie, elle écoutait les bonheurs des autres, et ça lui remontait le moral. Ca lui rappelait son ancienne vie, loin de ce lieu. Elle racontait tout ceci aussi à la vieille dame, qui lui assurait qu'elle n'avait rien perdu de sa beauté. Cette phrase avait plus de valeur que sa propre vie pour elle. D'ailleurs, sa vie ne tenait qu'à ces dires qui la réconfortent. Elle aurait envie que tout le monde lui dise qu'elle est toujours aussi belle tout le temps, qu'un homme tombe éperdument amoureux d'elle, mais le temps en avait décidé autrement.

Ce qu'il lui reste aujourd'hui, ce n'est que ses souvenirs du temps où son ancien amour vouait corps et âme pour elle et sa beauté, le temps où elle acceptait les compliments, en ne les écoutant qu'à moitié. Aujourd'hui ce n'est pas ça. Ce n'est plus ça.

Beaucoup disent que sa vie ne se résume qu'à attendre que ce temps revienne. Qu'elle vit dans le passé, qu'elle refuse de vieillir. Et ils n'ont pas tort. Sa vie ne se résume qu'à ça…

Elle retourna dans sa chambre, s'assit sur son lit et se déchaussa. Le lit se trouvant de l'autre côté de la pièce, contre le mur, était défait. Elle se demandait qui pouvait bien résider là. Peut-être un charmant jeune homme. Allez savoir…
Lucie Manford
Mélancolique


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