Un chemin vaut l'autre
De l'autre côté du miroir
L'Asile
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Temps brumeux

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Message Lun 23 Juin 2008 | 21:01  Répondre en citant

La surface de l'étang demeurait figée dans une constante stabilité. L'eau reflétait parfaitement le ciel bleu gris qui recouvrait le parc. Cette étrange couleur cachait quelque chose : le temps se couvrait. Une brume grisâtre s'échappa soudainement de l'eau vaseuse, pour aller se répandre tout autour de l'étang, lui donnant des faux-airs de cimetière. Très vite, le brouillard s'intensifia, empêchant toute visibilité. Jamais un tel phénomène ne s'était produit dans cette partie là du parc, pourtant, cela n'avait rien de surprenant. Après quelques minutes, la brume sembla fondre peu à peu, une longue et fine silhouette s'en détacha. Un homme marchait, il ne semblait pas accorder d'importance à ce qui l'entourait. Le brouillard disparaissait derrière-lui, comme absorbé par sa large cape noire.
Quelques secondes plus tard, tout était revenu à la normale, et ne restait d'étrange que ce nouveau venu. Son apparence aurait pu intriguer n'importe quel promeneur, mais il ne s'en souciait guère. Il marchait. Sa silhouette, trop longue et trop mince, se perdait sous un costume et une ample cape sombres. Son visage quant à lui, n'était qu'une mince couche de céramique blanche. Aucun regard ne transperçait derrière le masque vénitien que portait l'inconnu. Un masque blanc. White, ainsi appelait-on ce nouveau-venu qui ne laissait rien transparaître de ce qu'il était. Au dessus de son masque, un chapeau haut-de-forme prolongeait sa silhouette anormalement longue. Les bras du jeune homme remuaient gracieusement autour de son corps rachitique, dans un mouvement à la fois ridicule et envoûtant.
Il se dirigeait d'un pas sûr vers l'Asile, laissant son visage masqué figé vers cet objectif. Il finit cependant par détacher son regard de la grande bâtisse pour le fixer sur le ciel, désormais d'un doux bleu clair.

Le temps est radieux.

Un énorme crapaud pustuleux sauta soudainement hors de l'eau vaseuse de l'étang, pour atterrir à quelques pas à peine du nouveau venu. Le batracien souleva son chapeau, assez semblable à celui de White, et fit une révérence à ce dernier.

Salut à vous grand Monsieur. En effet, le temps est radieux. Vous marchez d'un pas assuré, un long voyage à accomplir ? croassa l'animal.

Je marche en effet, mais me voilà presque arrivé. A ce propos, si vous voulez bien m'excuser.

White désigna de son long doigt osseux le chemin qui menait à l'Asile pour montrer qu'il était pressé. Le crapaud lui fit un large sourire avant de replonger dans l'étang après quelques croassements satisfait. White reprit sa marche d'un pas tranquille, surpris d'avoir rencontré un crapaud si poli. Habituellement, les crapauds étaient de vrais rustres, surtout les gros crapauds marrons, ceux-là, White évitait toujours de leur parler.

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"C'est bien la pire folie que de vouloir être sage dans un monde de fous."
Erasme
White
Autiste


Message Ven 22 Aoû 2008 | 13:55  Répondre en citant

Cybèle se trouvait au bord de l'étang. Enfin, parce qu'elle l'avait décidé. Elle aurait aussi bien pu être n'importe-où ailleurs. Mais elle l'avait voulu ainsi. Qu'il était commode d'être une déesse ! Cybèle se trouvait donc au bord de l'étang. Quoi de plus normal ? Il ne faisait ni trop chaud, ni trop beau, ni trop frais, ni trop sec. Exactement le temps qu'elle aimait. Quoi de plus naturel ? Au bord de l'étang, assise dans l'herbe dans une position parfaitement distinguée, Cybèle contemplait son œuvre. Elle en était satisfaite.

Quoi de plus naturel ?

Les éléments étaient à leur place, la place où elle les avait souhaités. Les choses se déroulaient d'elles-mêmes, selon le cours qu'elle leur avait donné, telles qu'elle les avait voulues. Tout était selon son souhait. Jusqu'au moindre brin d'herbe lui procurant la délicieuse sensation d'un matelas tendre. Comme tout cela était réel ! Jusqu'à ce petit miroitement de l'air. Confortablement installée, Cybèle se délectait des miracles qu'elle accomplissait. Cette nappe de brume était d'une beauté éblouissante, décomposant l'image des lieux en une infinité de répliques miniatures, des joyaux sculptés en forme d'étang. Son talent ne connaissait pas de limite, ses idées sans cesse nouvelles, toujours plus précises, s'accomplissaient sans aucun cahot. Cybèle hésita. Cette bourrasque fraîche, ce brouillard épais, les avait-elle voulus ? Elle n'avait rien à craindre. Quoi de moins surprenant ?

Pourtant, quelque chose retenait son attention et l'empêchait de poursuivre ses méditations. Un grain de sable dans l'engrenage ? Ses pouvoirs infinis ne connaissaient ni défaut, ni erreur. C'était l'usage qu'elle en faisait qui pouvait se montrer inapproprié. Même déesse, à l'image de sa création, elle n'était pas à l'abri de la tromperie de ses sentiments. Mais pourquoi, même inconsciemment, aurait-elle désiré ce froid, cette obscurité qui prévenait de jouir de la beauté des lieux ? Non, Cybèle ne comprenait pas. Il ne lui arrivait jamais de commettre des impairs aussi grossiers. Elle quitta son état de béatitude à temps pour voir se dessiner une silhouette dans la brume. Etait-ce ainsi qu'elle l'avait voulu, et n'avait-elle fait que mettre en scène l'arrivée de celui ou celle qu'elle devait rencontrer ?

Cybèle n'en douta pas un instant. Du moins, jusqu'à-ce que l'apparition mystérieuse, non contente de s'avancer assez pour qu'elle distingue nettement son allure élégante, son costume d'un autre temps (et d'un autre monde), lui rappelant ironiquement ses propres créations, Venise et son carnaval, jusqu'à-ce que l'apparition ne s'adressât à un crapaud.

L'anecdote eût pu être tout à fait banale en d'autres circonstances, elle avait été plus d'une fois témoin des excentricités de ses enfants. Mais l'atmosphère imprévue et ses connotations, l'aisance avec laquelle le nouveau venu (ou peut-être malgré tout la nouvelle ?) s'était adressé à l'animal, la familiarité avec laquelle celui-ci lui avait répondu, le respect inhabituel qu'il lui avait témoigné, tout portait à croire que le crapaud était un rejeton du visiteur.

Capable de contrôler les éléments, de modifier le temps, l'espace, la création à sa guise, c'était impensable. Etait-il, lui aussi, un dieu ? Un adversaire ? Un ami ? Un collègue ? Venait-il lui rendre visite depuis son monde ? Comment réussissait-il à avoir un pouvoir sur le sien ? Et, surtout, pourquoi doutait-elle de la sorte ?

Cybèle posa le problème de façon plus simple. Soit elle-même avait voulu tout ceci, soit l'étranger était un dieu et avait, lui aussi, voulu tout ceci. Peu importait d'où avait émané cette volonté, elle était la même dans les deux cas et n'aboutissait qu'à une chose : leur rencontre.

Elle se leva donc et se dirigea sans hâte vers le… le demi-dieu, pour ainsi dire, impatiente de ce que sa rencontre lui révèlerait. Elle s'arrêta à quelques mètres de lui et le héla sans appréhension : Bienvenue, je me nomme Cybèle. Elle hésita. Devait-elle ajouter qu'elle était la maîtresse de ce monde ? Elle préféra garder le silence. Dans les deux angles sous lesquels elle avait envisagé la situation, elle était là pour apprendre quelque chose.

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You have to give up. You have to give up. You have to realize that some day you will die. Until you know that, you are useless.Tyler Durden
Cybèle
Paranoïaque


Message Ven 17 Oct 2008 | 16:27  Répondre en citant

Etrange, vraiment très étrange. Quelques pas à peine et voilà une seconde personne qui venait l'importuner. Le directeur s'occupait-il d'un asile surpeuplé ? Voilà un premier problème que le nouveau venu devrait régler avec lui.
La personne qui se dressait devant l'autiste n'avait rien d'une patiente, même si elle en était une : Cela était certain. White connaissait les noms des Instances, et elle n'en faisait pas partie.
La femme -ce n'en était pas vraiment une en réalité, elle cachait quelque chose- s'adressa à White sur un ton incertain mais desinteressé, à moins que ce ne soit le contraire. White s'arrêta immédiatement. Un coup de vent gonfla la cape noire du jeune homme, la faisant virevolter à ses côtés. Le masque de céramique, comme à son habitude, resta stoïque. Cependant, la voix de White parvint à s'extirper des lèvres blanches et immobiles.

- "L'aigle à déjà passé, l'esprit nouveau m'appelle. J'ai revêtu pour lui la robe de Cybèle…" clama l'autiste d'une voix forte et claire. Ces vers n'étaient pas de lui.

- Quelque chose me dit que le directeur à déjà parcouru les poèmes de Nerval. continua-t-il Ce qui explique votre présence ici.

Une libellule passa soudain sous les yeux du jeune homme, qui la suivit du regard un instant. Son "visage" livide resta longuement figé vers la mare, il semblait perdu dans ses pensées. Soudain, l'autiste sembla remarquer la présence de Cybèle. Il sursauta avant de tendre une main gantée de blanc.

- Ô ! Bonjour ! Je ne vous avais pas vu… Je m'appelle White, soyez la bienvenue dans cet établissement ! Je vois que nous avons à faire à une personne d'importance n'est-ce pas ?

White resta un court moment figé sur l'autre patiente. Puis, comme s'il avait de nouveau oublié son existence, il reprit sa marche tranquillement.
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"C'est bien la pire folie que de vouloir être sage dans un monde de fous."
Erasme
White
Autiste


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