— Fichtre et diantre, ça stink la mouche au miel ici !
Tranquillement, la petite rouquine gambadait. Ses pieds nus glissaient silencieusement sur le froid dallage, suivis de près par les attaches défaites de sa camisole blanche… plus très blanche aux extrémités. S'était elle perdue ? Peut être. Ils lui disaient que non, que le chemin était par là. Ils lui disaient que, bientôt, la sortie se présenterait à elle, toute seule comme une grande. Guffy pouvait toujours se moquer d'elle, Ils avaient toujours raison ! Pauvre Guffy, qui pensait trouver la sortie en continuant un peu plus. Stupide Guffy.
Brusquement, la schizophrène s'arrêta, au beau milieu d'un interminable couloir courbe. Sa tête pencha sur le côté, tandis que son regard chatoyant cherchait quelque chose. D'abord doucement, puis plus fort, elle laissait sa voix carillonner, puis résonner, dans l'étroit boyaux :
— Ouhouhouh ! Ouhouhouh ! OUHOUHOUH ! Reprenant une posture droite, la donzelle soupira, avant de poursuivre son chemin. A intervalle régulier, elle recommençait : Ouhouhouh ! Is there jemanden here ? Ouhouhouh ? Quelqu'un ? Somebody ? Alguien ? Ouhouhouh ! Qualcuno ?
Toutes les langues y passaient, avec une facilité d'élocution et un accent parfait. Ceci dit, le sens lui même restait compréhensible de toute personne… sauf que personne n'écoutait. A priori, en tout cas. Soupirant un peu plus fort, la jolie jeune fille se tut finalement. Arrivé à un croisement, elle pila, scrutant attentivement chacune des issues possibles.
— Par où ?
La question résonna un instant dans le vide, laissant la Brisure seule avec elle même. Les traits de son visages se déformaient sous l'interrogation, avant qu'un sourire ravit n'illumine sa face et qu'elle n'emboite le pas droit devant. Mais, à peine avait elle avancé d'un mètre que la folle s'arrêta de nouveau, croisant les bras, boudant comme une gamine fachée.
— Par où alors ?
Rebelotte… Le silence cueillit de nouveau la belle, avant qu'elle ne se décide enfin à tourner à gauche. Mais, une fois encore, le doute la saisit et elle s'arrêta de nouveau. Son expression faciale était si claire, quand à sa fureur, qu'on pouvait presque voir la fumée tourbillonner au dessus de sa tête. La mâchoire crispée, elle feula :
— Où ? Décidez vous, quoi, j'ai pas l'intention de dormir dans l'colon du cadre ce soir ! Après une courte pause, elle tapa du pied, excédée. Que j'me débrouille ?! Mais j'connais pas les boyaux de la tête moi !
Après ce court accès de colère, la jeune fille soupira encore. Mais, cette fois, c'était un soupire de soulagement. Visiblement, ses pensées semblaient se pacifier et elle pouvait enfin poursuivre sa route. Les tripes, c'est bon, mais à petite dose, dirons nous… Toujours est il que la jolie Brisure opta finalement pour la gauche. Mais ce n'était pas finit et, peut être qu'elle croiserait quelqu'un en chemin qui, lui, le connaitrait, le chemin.
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Attention aux miroirs... surtout lorsqu'ils sont brisés.